
QUELLES QUE SOIENT LES nouvelles obligations au service de base que le CRTC impose aux compagnies de téléphone et FSI canadiens, Quadro Communications est plus que prête. Elle pourrait même être l’entreprise canadienne titulaire qui aura le moins de mal à s’adapter aux nouvelles règles.
La coopérative de 3 100 membres dont le siège est à Kirkton, en Ontario, a déjà déployé de la fibre jusqu’à chaque ferme, grange et commerce dans ses quatre systèmes situés dans les comtés d’Oxford, Middlesex, Perth et Huron dans le sud-ouest de l’Ontario, environ 45 kms au nord de London.
Difficile à croire mais les gens vivant dans des endroits comme Wartburg (photo ci-dessous), Woodham et Sebringville ont accès à l’internet Gigabit depuis l’été quand la société a complété, en huit ans, la construction d’un réseau de fibre ayant couté $ 20 millions. Ce n’était pas juste pour les nouvelles zones résidentielles ou dans les régions les plus densément peuplées. Quadro a construit des fibres pour tout le monde jusqu’au bout de chaque route de son territoire.
« Si vous êtes dans nos échanges, chaque ferme, chaque maison, chaque commerce, chaque bâtiment ayant un téléphone est maintenant sur un réseau de fibre active, jusqu’au dernier mile », nous dit le directeur général, John DeHeer, lors d’une entrevue accordée à Kirkton, le mois dernier. En effet, grâce à une fibre dédiée partant des environs de St.Mary jusqu’à l’échange de Torix à Toronto, les clients de Quadro peuvent avoir accès à large bande le plus rapide au pays. « Il n’y a ni obstacles ou de fournisseurs secondaires ou que ce soit », a-t-il ajouté.
Mais, pourquoi fournir la fibre dans chaque foyer quand la plupart des autres transporteurs, surtout les plus grands, négligeraient certaines de ces routes isolées et diraient qu’ils ne pourraient jamais se permettre de fournir la fibre à la maison dans ces régions (en fait certains ont dit exactement cela durant les audiences sur les services de télécommunication de base – pour lesquelles le CRTC a annoncé sa décision mercredi , expliquant que la seule façon pour ces régions peu peuplée d’obtenir l’accès à la large bande sera probablement le sans-fil) ? Pourquoi ne pas prendre cet argent et se développer comme concurrent dans d’autres centres plus peuplés en territoire limitrophe en quête d’un plus gros profit ?
La réponse simple est que c’était la décision la plus juste.
« Il y a des zones et il y a des parcours qui ne font aucun sens économiquement sauf que c’était une promesse faite à tous nos membres» -John Alderman, Quadro Communications
« Nous avons décidé que les membres de la coopérative méritent tous le même service, » a ajouté le président du conseil de Quadro, John Alderman, durant la même visite. « Nous ne devrions pas juste prendre les clients les plus profitables et dire, « Oh, nous pourrions faire plus d’argent si nous mettions la fibre dans une ville voisine, dans le même temps vous ne recevez pas chez vous parce que nous ne pouvons pas faire autant d’argent. » Nous avons décidé que la promesse, comme on l’appelle, sera livrée à tous nos membres originaux. Ensuite, nous regarderons au-delà de notre territoire.
« Il y a des zones et il y a des parcours qui ne font aucun sens économiquement sauf que c’était une promesse faite à tous nos membres », a-t-il déclaré.
La société, comme son nom pourrait le suggérer, propose une offre quadruple complète à ses clients : voix, haut débit et télévision (y compris les options HD DVR et une solution TV Everywhere) – ainsi que le sans-fil comme revendeur de Bell Mobilité. Elle offre différents forfaits haut débit allant à de vitesses de 15 Mbits/s de téléchargement pour 55 $ par mois, jusqu’à son bouquet de 1 Gbit/s pour 300 $ par mois. Aucun bouquet n’impose de plafonnement de données, ni frais supplémentaires pour la location de modem.
L’histoire de Quadro, comme celle des autres compagnies de téléphone indépendantes du sud-ouest de l’Ontario que nous allons examiner dans les prochaines semaines, remonte à plus de 100 ans. L’entreprise est née de la conversion en coopérative de la Blanshard Municipal Telephone System qui desservait Sebringville, Granton, Kirkton et Uniondale.
Chaque client dans les échanges traditionnels (une carte est sur la photo, avec Alderman sur la gauche et DeHeer sur la droite) est un membre de la coopérative pour 1 $ par année et chacun d’eux obtient un vote sur le fonctionnement de la coopérative. Ils élisent un conseil d’administration qui supervise la direction de la société et ont aussi droit à des dividendes – dont la plus récente est la fibre pour tout le monde.
La société est également une ESLC dans quelques régions limitrophes et elle est co-propriétaire de l’entrerise Mitchell Seaforth Cable TV avec les coopératives indépendantes Hay Communications (Zurich, en Ontario) et Tuckersmith Communications (Kippen, en Ontario). Les trois sociétés ont acheté en 2009 l’entreprise de câblodistribution qui dessert des communautés telles que Mitchell, Lucan et Dublin et chacun de leurs systèmes de télévision numériques IPTV est alimenté par Quadro.
Une des choses les plus difficiles pour l’entreprise de 30 employés est d’expliquer aux gens dans la région que l’ancien système d’échange les confine dans leurs territoires. Puisque Quadro est titulaire dans les quatre circonscriptions et a déployé de la fibre essentiellement jusqu’à ses propres limites (à l’exception de quelques villages plus densément peuplées comme Bryanston), il faut souvent présenter des excuses aux gens sur certaines de ces routes de comté dont les maisons tombent juste à l’extérieur de leur territoire, ce qui signifie alors qu’une personne a accès à la fibre alors que la prochaine ferme dépend d’un réseau beaucoup plus lent.
En regardant la carte de leur territoire, DeHeer et Alderman aimeraient « aplanir » certaines lacunes bizarres dans leurs circonscriptions locales afin que certains voisins puissent jouir de services égaux. Mais déployer de la fibre – même juste un peu plus loin pour cette prochaine grange est cher, de $ 10 000 à 20 000 $ par kilomètre, selon les passages de rivière ou de chemin de fer et autres obstacles pour le réseau de fibre souterrain.
Comme entreprise en milieu rural, Quadro fait aussi face à certains défis démographiques que les exploitants urbains n’ont pas. L’ère de l’agriculteur de 100 à 500 hectares est terminée et les fermes devenant toujours plus grandes, le nombre de clients, lui, rétrécit. « Lorsqu’ils achètent une autre ferme, ils détruisent la maison, » a déclaré Alderman de ceux qui restent et décident d’augmenter la superficie de leurs fermes.
« En revanche, les gars qui restent ont les plus hautes exigences en termes de technologie, » ajoute-t-il.
« Ils veulent être connecté, » ajoute DeHeer. « Quand ils sont en voyage, ils veulent pouvoir regarder à l’intérieur de leur grange et voir ce qui s’y passe. Ils obtiennent leurs systèmes d’alarme via le réseau sans-fil ou via l’internet. Ils peuvent voir à l’intérieur des granges qui ont toutes des caméras… et nous fournissons cette connexion pour eux… Certains d'entre eux ont quatre routeurs dans leur grange pour s’assurer qu’ils peuvent recueillir toutes les données. Ces gens effectuent des suivis sur tous leurs animaux sur un appareil de poche. C’est phénoménal. »
« Les gamins viennent me rendre visite car l’internet est plus rapide chez grand-papa que chez eux en ville. » – Alderman
Et dans certains cas, avoir de la fibre a d’autres bénéfices. « J’ai eu un agriculteur qui m’a dit, « Les gamins viennent me rendre visite car l’internet est plus rapide chez grand-papa que chez eux en ville. », » a dit Alderman.
Certaines des zones de Quadro sont aussi des communautés dortoirs pour la ville de London (pop. 366 000). Ces gens sont heureux de savoir qu’ils peuvent vivre en campagne avec une fibre à large bande.
Ce qui est frustrant pour des sociétés comme Quadro est le fait que si peu de gens en dehors de leurs régions savent comment progressive est leur entreprise et combien leurs clients sont chanceux alors que tous présument que parce qu’un endroit comme Woodham, un si petit point sur la carte, n’a pas accès fiable à un réseau à haut débit.
« J’ai entendu un professeur de l’Université de Western Ontario en entrevue sur la CBC qui se servait de Waylan’s Corner, qui est juste à côté d’ici, de l’autre côté de Woodham, comme exemple » a rappelé DeHeer. « Il a évoqué ses grands-parents en disant « Oh, mes grands-parents vivent à de Waylan’s Corner, pensez-vous qu’ils ont la fibre ? » Je suis dans la voiture à ce moment et je hurle : ILS EN ONT ! »
DeHeer et Alderman ont réitéré à plusieurs reprises durant notre entrevue que les clients de Quadro, principalement de petites villes rurales, veulent et ont besoin des mêmes avantages en large bande que les grandes villes.
Cependant, alors que les grandes compagnies de téléphone ont encore besoin de plusieurs années pour construire leur réseau avec fibre dans les régions les plus peuplées et les entreprises de câble encore plusieurs mois ou années des vitesses Gigabit promises par DOCSIS3.1, les clients de Quadro peuvent réellement avoir le meilleur des deux mondes.
NDLR : il s’agit de la première dans ce qui sera une série qui se poursuivra jusqu’en 2017, où Cartt.ca examinera les nombreux fournisseurs de services indépendants offrant une connectivité aux Canadiens en milieu rural ou semi-rural : comment ils fonctionnent, leurs stratégies de croissance, leurs frustrations, leurs défis et leurs succès et si le gouvernement est une entrave ou une aide (ou les deux). Il y a des indépendantes de différentes tailles d’un océan à l’autre, certaines desservant environ 1 million de Canadiens, et nous leur avons parlé. Leur économie et leur démographie sont différentes, mais – comme dans le cas de Quadro ci-dessus – leurs choix peuvent grandement bénéficier leurs clients. Veuillez nous contacter à editorial@cartt.ca si vous souhaitez nous raconter une histoire sur un opérateur indépendant.